Nicole Croisille est morte : adieu à une voix unique de la chanson française

Une disparition qui interroge et qui bouleverse

Comment dire au revoir à une voix qui a traversé les décennies ? Comment rendre hommage à une artiste qui, sans jamais vraiment chercher la lumière, a su la capturer dans chacun de ses refrains ? Nicole Croisille est morte à l’âge de 88 ans, et avec elle s’éteint un pan vibrant de la chanson française. J’ai grandi en entendant ses chansons flotter dans l’air, souvent à l’improviste, comme un vieux souvenir qui refait surface dans une salle d’attente ou une cuisine animée.

Tableau des grandes étapes de sa carrière

Année	Événement marquant
1964	Meneuse de revue aux Folies Bergère aux États-Unis
1966	Succès mondial avec Un homme et une femme
Années 1970	Succès de Parlez-moi de lui, Téléphone-moi
1976-1978	Concerts à l’Olympia
Années 2000	Retour sur les planches avec Les monologues du vagin

Une artiste multiple et singulière

Nicole Croisille, c’était une voix, mais pas seulement. C’était une interprète intense, une danseuse agile, une comédienne subtile. Née en 1935 à Neuilly-sur-Seine, elle a d’abord suivi un parcours classique, presque banal — sténodactylo, comme on disait à l’époque — avant d’embrasser une vie d’artiste contre l’avis de son père.

Ce que j’admire profondément, c’est qu’elle n’a jamais couru après le succès. Il est venu tard, après ses 35 ans, comme une récompense méritée : Parlez-moi de lui, Je ne suis que l’amour, ou encore La Garonne… Des titres qui, aujourd’hui encore, font vibrer les mémoires.

Des chansons d’amour et de courage

Elle disait : « Je n’ai chanté que des chansons d’amour. » Et c’est vrai. Nicole Croisille avait ce don rare de toucher sans appuyer, d’émouvoir sans surjouer. Même si elle n’écrivait pas ses chansons, elle les vivait. Elle les habitait. Il suffisait de l’écouter pour le comprendre.

Sa voix chaude, légèrement voilée, restait gravée. Un peu comme un parfum discret mais inoubliable. Je me souviens l’avoir entendue pour la première fois dans le film Un homme et une femme, ce fameux « dabadabada » devenu emblématique. C’était à la télé, un dimanche après-midi, chez mes grands-parents. Cette chanson est devenue un pont entre les générations.

Une vie entre scène et silence

Ce que peu savent, c’est qu’elle a connu aussi des silences. Des moments d’éloignement, de fatigue vocale, d’exil au Québec. Là-bas, elle a vécu une forme de retrait, sans jamais cesser d’être artiste. Elle revenait sur scène dès que possible, comme en 2019, à 83 ans, dans une pièce de Guitry. Elle s’amusait alors « comme une petite folle », disait-elle. Quel panache.

Elle était restée proche de Claude Lelouch, qui lui offrait des rôles secondaires dans ses films. Toujours là, discrète mais essentielle.

L’héritage d’une voix inoubliable

À l’heure où l’on parle tant d’algorithmes, de tubes formatés, la disparition de Nicole Croisille nous rappelle la force de l’authenticité. Elle n’a pas cherché à plaire à tout prix. Elle a suivi son chemin, entre jazz, variété, théâtre et cinéma. Et c’est peut-être pour cela qu’elle continue de nous parler.

Pour les amoureux de la chanson française, pour ceux qui ont dansé sur ses refrains ou pleuré en l’écoutant, son départ est plus qu’un fait divers. C’est une perte intime.

Ce qu’elle nous laisse

Des chansons intemporelles, à (re)découvrir sans modération
Une inspiration pour celles et ceux qui osent commencer tard
L’image d’une artiste complète, profondément humaine

En guise d’au revoir…

Nicole Croisille est morte, mais sa voix résonne encore. Dans nos souvenirs, dans les films de Lelouch, dans les refrains d’un amour chanté mille fois. Elle nous laisse en héritage un répertoire riche et une leçon de vie simple : suivre son art, coûte que coûte.

Et moi, je sais qu’en entendant Parlez-moi de lui, je penserai toujours à elle… et à cette époque où la chanson racontait encore des histoires.

Nicole Croisille est morte, mais son chant, lui, ne s’éteindra pas.